Balade en nature Cellipontine

Pont-à-Celles, morne plaine ? Que nenni ! Trois réserves naturelles Natagora, de natures forts différentes, émaillent le canal Bruxelles-Charleroi sur le territoire communal. Soutenues par la commune et les habitants, elles offrent un bol d’air pur dans une région de grandes cultures. Ici, vous pouvez faire de magnifiques promenades.

Entre les patates, le maïs et les céréales, nous voilà débarqués dans la petite réserve de Biernimont. « On commence par la plus petite, avait dit Vincent, elle est vraiment cachée au milieu des champs, et je rame toujours pour la retrouver ». Vincent Swinnen est responsable des réserves hennuyères de Natagora. Au bout d’un chemin agricole, il nous fait traverser une belle haie vive. En fruits, aubépines, viornes obiers, noisetiers, cornouillers mâles, rehaussés d’aulnes et de charme, ceinturent la prairie pentue où sourdent les sources du Biernimont.

Le cimetière de touradons

Mitoyennes à une culture de céréales, ces haies jouent un rôle important de barrière pour les engrais et pesticides qui auraient vite fait de dévaler la prairie et la transformer en champ d’orties. Au pied de la pente se trouve l’intérêt botanique du lieu : plusieurs touradons de laîche paniculée, grosses buttes végétales créées par des carex qui poussent sur leurs anciennes racines.

Dans la partie gérée, où arbres et arbustes ont été enlevés il y a plusieurs années, les buttes sont coiffées de belles gerbes de plantes. Plus loin, dans un taillis de noisetiers, un étonnant spectacle s’offre à nos yeux : un cimetière de touradons. Continuellement à l’ombre, des dizaines de buttes semblent mortes. En enlevant les ligneux, l’arrivée de lumière redonnerait certainement vie à ces étranges structures végétales. Il manque cependant de volontaires pour procéder aux travaux. Avis aux amateurs…

De l’autre côté du canal, un bon kilomètre à vol d’oiseau plus loin, nous arrivons à l’étang de Launoy. Entre deux parcelles cultivées, une série de billes de chemins de fer, plantées à la verticale, forment une haie d’honneur pour les visiteurs. Pour la circonstance, un tarier des prés en passage trône sur un des piquets.

Tout le monde est plus que bienvenu sur le site car, plutôt qu’une réserve naturelle, il s’agit d’un « refuge naturel ». Créée à partir des subsides régionaux pour l’acquisition et l’aménagement d’espaces verts publics, elle se doit de rester ouverte à tous. Deux chemins bien balisés en font d’ailleurs le tour : le « sentier du torcol » et le « sentier du loriot », dont les noms laissent présager la diversité d’oiseaux qui peuplent les lieux. Vincent nous confirme l’intérêt des Cellipontins : « De jeunes naturalistes locaux commencent à s’intéresser au site. Ils y viennent et encodent leurs observations intéressantes. Il y a peu, l’un deux a repéré un bihoreau gris, un petit héron peu courant. »

Lotissement pour les pics

Le site a été créé à partir de remblais de creusement du canal Bruxelles-Charleroi, qui jouxte les lieux. Au beau milieu de ces terrains majoritairement boisés, se trouvent un ancien étang de pêche et de nombreuses petites zones humides où se forment des roselières propres à accueillir la rousserolle effarvatte ou de nombreux batraciens. La tempête de 2010, qui a arraché plusieurs toits dans la région, a laissé des traces ici également. De nombreux peupliers ont été brisés, ne laissant subsister que des troncs morts sur pied. Une aubaine pour les pics et de nombreux insectes qui y trouvent refuge. Leur présence offre au paysage un côté envoûtant. Après les touradons, nous voici dans le cimetière des peupliers !

La plus grande partie du site est faite de milieux forestiers. Les essences présentes sont étranges : des plantations serrées de saules qui montent comme des bouleaux, des plantations mixtes d’aulne glutineux et d’aulne blanc, des plantations de mélèzes… Tout cela date et avait peut-être comme origine une volonté de stabiliser ces talus qui bordent le canal. La biodiversité s’yplaît, en tout cas. Entre les branches, nous apercevons un beau nid de rapace. Est-ce celui du hibou moyen-duc qui est souvent aperçu sur les lieux ? Un pic épeiche s’annonce, toquant sur les troncs, avant de s’élancer entre les arbres de son vol chaloupé.

Commune pilote et nature préservée

Quittant Launoy, nous nous élançons à notre tour vers la réserve de Viesville, troisième site situé sur Pont-à-Celles, cédé par la commune à Natagora par voie de bail. Hélène Goethals, la dynamique éco-conseillère, nous y attend. « Que ce soit à Launoy ou Viesville, les citoyens sont très actifs et impliqués dans la protection de la biodiversité. Il est logique que la commune les soutienne. Les commissions de gestion et la régionale Natagora font notamment un grand boulot de préservation et sensibilisation ».

Hélène nous amène rapidement sur un petit sentier tortueux, bordé de bouleaux et tacheté de belles plaques de soleil. Elle y organise des balades silencieuses avec les enfants de première primaire de l’école voisine, lâchés deux par deux dans la forêt. « À l’arrivée, je leur demande de dessiner leurs impressions. Les résultats sont étonnants, on retrouve plein de bêtes fantaisistes. Au-delà des promenades naturalistes, j’aime amener le public à profiter de ses cinq sens, à se relier à la nature pour mieux la protéger par la suite. » Située en zone péri-urbaine, la réserve de Viesville est idéale pour la sensibilisation. Mais pas que pour ça. Constituée également de remblais du canal datant des années 1950, elle a développé une grande diversité de milieux.

À vos bottines… ou vos cisailles !

Les coteaux sont boisés de nombreuses essences, aussi bien exotiques comme le robinier ou le chêne rouge qu’indigènes comme l’érable, l’aulne ou le frêne. Au sommet, de belles prairies maigres de fauche se découvrent à la sortie des bois. Les remblais ont créé des contextes géologiques très variés, qui recèlent plus de 500 espèces de plantes et 200 espèces de champignons recensés. Ici aussi, les traces de récentes tempêtes sont présentes. Les sentiers – ouverts au public – que nous traversons sont jonchés de nombreux arbres déracinés. Les déviations tracées par le public montrent d’ailleurs la fréquentation des lieux. Si les sentiers seront dégagés, le bois restera sur place, pour le plaisir d’une faune xylophage variée.

De passage dans la région, n’hésitez donc pas à aller visiter ces sites étonnants. Et si vous voulez vous impliquer à plus long terme, n’hésitez pas à prendre contact avec Natagora, les bras sont toujours les bienvenus pour aménager les sentiers, dégager les zones humides ou restaurer les digues !


Texte: Benjamin Legrain

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